CONSEIL DE TERRITOIRE MARSEILLE PROVENCE
SÉANCE DU JEUDI 24 NOVEMBRE 2016
Monsieur le Président,
La proposition budgétaire pour notre Etat Spécial de Territoire 2017 pose deux problèmes de fonds.
Le premier, c’est qu’on nous demande en quelque sorte « un vote à l’aveugle ».
Je m’explique.
D’une part, la métropole a engagé l’élaboration des budgets 2017 sans connaître toutes les données en matière de dotations, de fiscalités et de péréquations en provenance de l’Etat et de la loi des finances pour 2017. Sans connaître non plus le résultat de notre propre exercice budgétaire de l’année 2016.
Sauf erreur de notre part, la loi autorise le bloc communal à adopter son budget en toute lisibilité des données financières jusqu’au 15 avril.
Pourquoi cette précipitation qu’on ne retrouve pas dans d’autres Métropoles comme Lyon ou Paris ?
« Vote à l’aveugle » également, car l’Etat Spécial ne reflète qu’une partie des politiques métropolitaines mises en œuvre sur notre territoire de Marseille Provence.
Certes, c’est la loi. Elle ne fait obligation à la métropole, que de faire adopter ces Etats Spéciaux de Territoires entre le Débat d’Orientations et le vote du budget.
Mais, la loi ne nous interdit pas d’adosser les Etats Spéciaux de Territoires à une présentation globale des orientations et du Budget Primitif de la métropole et de ses retombées sur les 6 territoires, dont le nôtre.
D’autant que, contrairement à ce qui a été annoncé, la métropole ne garantit pas le maintien des capacités d’interventions de nos précédentes intercommunalités.
Elle les réduit pour tenter de dégager des marges de manœuvre pour un projet métropolitain, que l’Etat ne le lui a pas accordé, malgré toutes les annonces gouvernementales successives depuis 3 ans.
Et cela m’amène au deuxième problème de fond posé par cet Etat Spécial 2017 :
Les chiffres de dotation pour le territoire.
En fonctionnement, on est sur une augmentation en trompe l’œil de 10 M€ de la dotation, car elle englobe désormais les dépenses chapitres 65 et 67 pour se conformer aux textes réglementaires.
En réalité on est sur une baisse de 2,7% des crédits de fonctionnement par rapport à 2016.
C’est le résultat d’un cadrage austéritaire imposé par l’exécutif métropolitain sur les charges générales, la masse salariale et les subventions.
A l’arrivée c’est un nouveau recul des services de proximité rendus à nos concitoyens.
En investissement, on a carrément tourné le dos au maintien des objectifs engagés par les EPCI et même à la capacité réelle de réalisation sur une année.
De 218,6 M€ en 2016, on passe à une dotation de 142,1M€ pour 2017 (- 65%).
Et, contrairement à ce qui peut être dit, cette réduction n’est pas qu’un ajustement de la programmation aux capacités de réalisation des services.
D’abord, parce qu’on ne connaît pas le résultat des crédits engagés cette année.
Une année tronquée au demeurant, puisqu’elle n’a réellement commencé qu’au 2° trimestre 2016.
Ensuite, parce que la dernière référence des capacités réelles des dépenses d’équipements, c’est le compte administratif 2015 de MPM.
Or que nous dit-il ?
Dépenses réalisées en équipements : 275 M€. Si on déduit les 38 M€ affectés aux transports (compétence devenue métropolitaine), voire les 63 autres M€ affectés au financement de la L2, la dépense en équipements pour 2015 s’établit autour de 175 M€.
On est donc pour 2017, sur un recul de 19% de l’investissement programmé pour notre territoire.
Non seulement, Monsieur le Président, il est maintenant évident qu’on ne peut pas faire mieux avec moins ; Mais il est malheureusement de plus en plus visible qu’il y a une réelle volonté d’amoindrir sérieusement les capacités d’interventions des conseils de territoires, contrairement à l’esprit de la loi qui pousse à une déconcentration de la mise en œuvre des politiques de proximités.
Pour toutes ces raisons nous ne pouvons pas approuver cet Etat Spécial de Territoire pour 2017.
De notre point de vue, il est tout à fait possible d’avoir une autre construction budgétaire qui ne se contente pas de tourner les vis de l’austérité sur les services, les personnels, les projets de territoires, donc les réponses aux besoins de nos concitoyens.
Certes, il y a nécessité de dégager des marges de manœuvres pour définir et réussir un projet métropolitain.
Ce n’est pas en déshabillant l’action territoriale de proximité qu’on les trouvera, mais plutôt en soutenant des propositions pour aller chercher de nouvelles recettes vers l’Etat, vers le monde économique et les répartir plus solidairement.
C’est le sens des 4 propositions que nous avons faites lors du débat d’orientations budgétaires de la métropole. Je les rappelle en résumé :
1°) Mener en commun la bataille pour obtenir du gouvernement qu’il respecte enfin ses annonces successives de financements en centaine de millions d’euros.
2°) Proposer au monde de l’économie et de la finance, de partager les efforts, par une contribution exceptionnelle sur la durée d’investissement de l’agenda métropolitain de la mobilité. Soit par l’augmentation du Versement Transport à 2,8 – comme c’est le cas à Paris et dans les Hauts de Seine. Soit par une contribution additionnelle sur l’immobilier des entreprises, des bureaux et des commerces.
3°) Revisiter tous les contrats de concessions et d’exploitation attribués au privé pour renégocier les redevances à la collectivité et se mettre en situation d’en récupérer en gestion publique à l’échéance des contrats. Enjeu : récupérer 3M€ de bénéfices nets dégagés en 2015 pour les parkings de notre territoire ; 14 M€ pour la concession du tunnel Prado-carénage et 14 M€ pour la DSP des Eaux de Marseille Métropole. Total : 31 M€
4°) Mettre à l’étude une répartition plus solidaire du FPIC (Fonds de Péréquation Intercommunal et Communal) en adoptant des critères spécifiques à notre métropole pour les communes et les villages qui en ont le plus besoin pour faire face aux inégalités sociales et territoriales.
Abstention.
Karim Ghendouf