CONSEIL DE LA MÉTROPOLE
SEANCE DU LUNDI 17 OCTOBRE 2016

 

 

Monsieur le Président,

 

Il faut reconnaître aux services en charge des questions budgétaires un grand mérite dans la présentation de ce Rapport d’Orientations Budgétaires.

Ils l’ont fait, sans avoir toutes les données budgétaires en provenance de l’Etat et de la loi des finances pour 2017. Et surtout ils l’ont fait en sachant qu’on ne peut pas faire mieux avec moins d’argent.

C’est la première évidence à cause d’un Etat qui continue de se défausser.

Le total prévisionnel des dotations et compensations est en baisse de 15 M€ sur 2016 et pire encore pour le Fonds de Péréquation. Il serait en recul de 30 M€ sur 2016.

Donc 45 M€ en moins que ne compenseront pas les hausses de fiscalités locales et du Versement Transport prévisibles à hauteur de 31 M€.

Celles et ceux qui pensaient que la mutualisation des moyens de nos territoires permettrait d’améliorer nos capacités de réalisation de nos projets respectifs, en sont pour leur frais.

Et avec ce constat, ce qui saute également aux yeux, c’est qu’Aix-Marseille-Provence est dans l’incapacité de dégager des marges pour un projet métropolitain.

D’où un rapport d’orientations techniquement sérieux, mais politiquement vide de projets, à part celui de tourner les vis de l’austérité, pour les services, les personnels, les territoires, donc les réponses aux besoins de nos concitoyens.

C’est particulièrement criant sur la mobilité.

Alors que tout le monde s’accorde à dire qu’on mesurera l’intérêt de la Métropole sur cette priorité, la création d’un budget annexe entièrement dédié aux transports aboutit à une proposition de dépenses d’équipement de 85,5 M€ contre 154,4 M€ en 2016.

A ce rythme, nous continuerons à trainer des décennies de retard sur les besoins de mobilité. Où est l’accélérateur de la Métropole, que le gouvernement et une majorité de parlementaires à gauche et à droite ont fait miroiter pour forcer le passage ?

Ici même en juin dernier, on nous a pressé d’adopter un pacte de gouvernance financier et fiscal, pour être, paraît-il, en mesure de négocier à la hausse la part de l’Etat.

Heureusement qu’on l’a adopté avec une clause de revoyure en Novembre. C’est-à-dire dans 15 jours.

Car le bilan d’étape est négatif et risque très concrètement de pousser à la remise en cause des engagements comme :

Le maintien des engagements pris antérieurement par les 6 EPCI ;

La possibilité de défendre les politiques de tarification avantageuses, gratuité comprise ;

La garantie des droits et des avantages sociaux acquis aux agents ;

La mise en œuvre de mécanismes de solidarité horizontale et/ou verticale ;

Derrière la réalité de la rétractation des soutiens de l’Etat – depuis le début de la décennie – les justifications pour actionner les coups de ciseaux sont déjà présentes dans ce Rapport d’orientations :

« Charge de la dette…Poids des reversements aux communes…Maitrise de la masse salariale »

Aller dans ce sens, ne peut qu’affaiblir un peu plus les politiques et les services publics que sont en droit d’attendre nos concitoyens et les forces vives de notre territoire et dans nos 92 communes. Sauf à vouloir faire massivement appel à l’investissement et à la gestion du privé au détriment de l’intérêt général, de la solidarité et du recul des inégalités sociales et territoriales.

Nous avons une tout autre analyse des choix à faire.

1°) Quand on parle de la dette, on parle des infrastructures et des équipements que les six EPCI ont et vont réaliser pour améliorer le fonctionnement du territoire, son développement économique et son cadre de vie.

Sauf à ne rien faire et s’en tenir à la redistribution compensatoire aux 92 communes, tous les territoires ont emprunté pour pouvoir réaliser ces projets. MPM plus que les autres compte tenu de la faiblesse de ses ressources budgétaires et fiscales.

Mais aujourd’hui personne ne se plaint du fonctionnement de ces équipements qui ont pour effet d’accroitre l’offre de transports collectifs et propres ; de commencer à modifier les modes de déplacements courts (piétonisation et vélos); de diminuer jusqu’à la marge les rejets polluants en mer sur tout le littoral ; et d’avoir attiré ou retenu l’investissement économique.

Et si j’en crois la mission métropolitaine qui a travaillé sur le sujet – je cite : « le niveau d’endettement par habitant d’Aix-Marseille-Provence est sensiblement inférieur à celui des métropoles de Nice, Bordeaux, Lyon, Lille, Nantes, Strasbourg et Toulouse ».

2°) A propos de masse salariale, là aussi de quoi parle t-on ?

Si j’en crois le ROB, elle se situera en 2017 autour de 335 M€ contre 326 en 2016, puisque le rapport a retenu une progression plus réaliste de 2,5% contre 1,5% dans le Pacte Financier et Fiscal.

Soit entre 15 et 16% de nos recettes de fonctionnement et 177 € par habitant contre 217 € en moyenne pour les 7 métropoles citées plus haut.

Donc de notre point de vue, l’enjeu n’est pas de pointer du doigt le territoire voisin endetté qui plomberait tout développement, l‘agent métropolitain qui coûte trop cher ou la commune à qui on reverse trop de compensation ; mais de soutenir des propositions pour aller chercher de nouvelles recettes vers l’Etat et vers le monde économique…et les répartir plus solidairement.

Et cela m’amène aux propositions que nous souhaitons mettre en débat.

1° proposition : mettre en commun la bataille pour obtenir du gouvernement qu’il respecte enfin ses annonces successives de financements. Cela ne peut se chiffrer qu’en centaine de millions d’euros.

2° proposition : la mobilité est vécue par les entreprises et les commerces comme la question numéro 1 à résoudre pour leur activité. Proposons leur de partager les efforts, en mettant à l’étude une contribution exceptionnelle du monde économique sur la durée d’investissement de l’agenda métropolitain de la mobilité.

Cela peut passer par la demande auprès du gouvernement de pouvoir porter le versement transport à hauteur de 2,8 – comme c’est le cas à Paris et dans les Hauts de Seine. A la clé : 129 M€ de plus que les 324 M€ espérés en 2017 .

Cela peut également se concrétiser par une contribution additionnelle sur l’immobilier des entreprises, des bureaux et des commerces.

Deux contributions de ce genre, l’une pour les bureaux et l’autre pour les entreprises de réseaux assises sur le matériel roulant de la RATP, génèrent chaque année 229 M€ pour le plan de financement du Grand Paris Express.

Si on le ramène en proportion de notre métropole, cela peut aller jusqu’à 60 M€.

3° proposition : revisiter tous les contrats de concessions et d’exploitation attribués au privé pour renégocier quand c’est possible les tarifs usagers ou les redevances à la collectivité – je pense en particulier aux parkings. Mais également pour se mettre en situation d’en récupérer en gestion publique à l’échéance des contrats.

Deux exemples pour illustrer les enjeux en terme de ressources financières :

Le compte d’exploitation de la Société des Eaux de Marseille Métropole inclus dans le rapport annuel sur la qualité du service public eau et assainissement, fait apparaître un bénéfice net de 14,2 M€ en 2015 contre 4,8 M€ prévu à la signature du contrat.

14,2 M€ qui pourrait revenir dans les caisses de la métropole au lieu de s’envoler vers les actionnaires sans compter ce qui a pu remonter auparavant à la société mère en frais de siège et autres charges ou prestations.

Deuxième exemple : La société du Tunnel Prado Carénage dégage chaque année entre 10 et 12 M€ de bénéfices nets.

Si on additionne ces deux DSP, c’est 20 à 26 M€ par an de recettes nettes à récupérer.

Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais ça doit rentrer dans notre prospective d’investissement.

4° proposition : mettre à l’étude et en débat une répartition plus solidaire du FPIC en adoptant des critères spécifiques à notre métropole pour les communes et les villages qui en ont le plus besoin pour faire face aux inégalités sociales et territoriales.

Le principe n’a pas été retenu pour 2016. Nous entendons faire des propositions pour 2017.

Voilà Monsieur le Président et Chers Collègues, les remarques et les propositions que nous faisons sur ce rapport d’orientations.

Vous avez pu l’entendre, elles s’éloignent d’une vision austéritaire et inégalitaire d’une métropole entièrement vouée à la concurrence économique, pour se tourner vers un projet métropolitain plus solidaire, en capacité de construire une dynamique de développement durable qui fasse reculer les inégalités sociales et territoriales.

 

Marc POGGIALE

 

 

 

Rapport d’Orientations Budgétaires (ROB)
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